vendredi 31 octobre 2014

Deux femmes disparaissent


Le hasard des sorties en salles rapprochent deux films dont les pitchs respectifs ne peuvent qu'inciter à la comparaison. Quand bien même leur vision ne laisse guère perdurer ce faux sentiment initial de similarité, Gone Girl de David Fincher et White Bird in a Blizzard de Gregg Araki ont le même point de départ : la soudaine volatilisation d'une femme, épouse, et, dans le second cas, mère de famille. Que cette famille soit présentée, d'emblée, chez Araki, comme un naufrage – ce qui est, d'ailleurs, le principal défaut du film, tant le couple Connor semble sorti des années 50, quand le récit se voudrait ancré dans le tournant des années 80/90 –, ou que, chez Fincher, cela passe par un premier temps d'installation d'une (trop belle ?) image de couple moderne idéal, alliant complicité sentimentale, intellectuelle et sexuelle, cette image lisse va évidemment s'effriter au fil des deux œuvres pour révéler rancunes et rancœurs accumulées au fil du quotidien, frustrations, petites ou grandes tromperies, et autres cadavres dans le placard (d'aucuns étant même susceptibles d'en sortir). C'est à partir de là que les deux films divergent, aussi bien dans leur propos que, il faut bien le dire, dans leur degré de réussite. L'héroïne, et le véritable cœur, de White Bird est la jeune Kat Connor, servie à l'écran par l'interprétation remarquable de Shailene Woodley. La soudaine absence maternelle vient contraster avec l'auto-centrage de l'adolescence, le corps absent avec le corps présent, désirant, s'imposant : "Just as I was becoming nothing but my bodyflesh and blood and raging hormonesshe stepped out of hers and left it behind." Tout semblant indiquer qu'Eve Connor a filé de son propre chef loin d'un ménage étouffant, d'un mari qu'elle méprisait et d'une fille qu'elle s'était mise à jalouser, Kat entend continuer à mener sa vie (et à suivre ses désirs) comme si de rien n'était, et paraît comme incrédule à chaque fois que la trajectoire de sa bulle d'air autarcique se heurte à des personnes réagissant différemment qu'il s'agisse de son petit ami soudain réticent à baiser avec elle, de sa psy l'interrogeant longuement sur ses rêves et sur ses sentiments, ou de son père lorsque, après plusieurs années, il craint la réaction de sa fille au moment où il décide de se remettre en couple. Ce portrait qui pour être anti-mélodramatique n'en est pas moins sensible fait tout le prix du film d'Araki. Il est d'autant plus regrettable que ce dernier n'ait su s'en contenter.


Mais il lui faut aussi nous présenter la disparue comme une figure fascinante, ou à tout le moins intrigante ce en quoi il se prend les pieds dans le tapis et plombe son film, contraignant Eva Green à en faire des tonnes dans un rôle mal taillé pour son style (d'ailleurs mal taillé tout court) –, et un retournement final lorgnant vers le polar qui arrive quelque peu comme un cheveu sur la soupe. Sur tous ces points, la comparaison avec l'excellent dernier opus de David Fincher fait mal... D'une part, ce dernier dose bien plus intelligemment ce qu'il peut attendre de son casting, le caractère un peu falot de Nick Dunne / Ben Affleck faisant ainsi ressortir, par contraste, la "supériorité" d'Amy Dunne / Rosamund Pike, ce qui se révèlera l'une des clés du mystère. D'autre part, non seulement Fincher gère bien mieux le passage d'un genre (le drame sentimental) à l'autre (le thriller psychologique), mais il ne s'arrête pas en si bon chemin. Car chaque fois que l'on peut croire savoir où Fincher nous emmène, celui-ci relance, avec virtuosité, le récit dans une autre direction, sans pour autant donner l'impression de s'éparpiller. Gone Girl se révèle ainsi, progressivement, une sorte de parodie glacée de screwball comedy (plus réussie que l'Intolerable Cruelty des frères Coen dans le même registre, il y a quelques années) sur fond de féroce satire des médias et de leur emprise sur notre société superficielle. Microcosme : le couple parfait, façon magazine, ou du moins sommé de donner et de conserver toujours cette apparence, tout aussi bien vis-à-vis de l'extérieur qu'à l'intérieur même de la cellule familiale. Macrocosme correspondant : une nation entière (et au-delà, car qui croira que le problème se limite aux États-Unis ?) ne demandant qu'à se laisser manipuler par des éditorialistes sans cervelle ni scrupules et des conseillers en communication roublards, tournant et retournant les opinions à partir de rien, ou presque. De haut en bas de l'échelle, un royaume généralisé de l'image déconnectée de tout fond, dont Fincher achève exemplairement la traversée dans une scène finale grinçante, où tout le monde se déteste profondément, mais où la nécessité de faire bonne figure devant les caméras fait loi pour tous. "Partners in crime".

mercredi 15 octobre 2014

Étouffement


– Et puis vous avez grandi, vous avez étudié, et vous avez commencé à philosopher, n'est-ce pas ? Nous en sommes tous là. Il semble que vers l'âge de l'adolescence, la vie intérieure du jeune être humain se trouve soudain aveulie, châtrée de son courage naturel. Sa pensée n'ose plus affronter la réalité ou le mystère en face, directement ; elle se met à les regarder à travers les opinions des "grands", à travers les livres et les cours des professeurs. Il y a pourtant là une voix qui n'est pas tout à fait tuée, qui crie parfois, – chaque fois qu'elle le peut, chaque fois qu'un cahot de l'existence desserre le bâillon, – qui crie son interrogation, mais nous l'étouffons aussitôt. Ainsi, nous nous comprenons un peu. Je puis vous dire, donc, que j'ai peur de la mort. Non pas de ce qu'on imagine de la mort, car cette peur est elle-même imaginaire. Non pas de ma mort dont la date sera consignée dans les registres de l'état civil. Mais de cette mort que je subis à chaque instant, de la mort de cette voix qui, du fond de mon enfance, à moi aussi, interroge : "que suis-je ?" et que tout, en nous et autour de nous, semble agencé pour étouffer encore et toujours. Quand cette voix ne parle pas – et elle ne parle pas souvent ! – je suis une carcasse vide, un cadavre agité. J'ai peur qu'un jour elle ne se taise à jamais ; ou qu'elle ne se réveille trop tard – comme dans votre histoire de mouches : quand on se réveille, on est mort.

René Daumal, Le Mont Analogue.

jeudi 9 octobre 2014

Arsenic et vieille demeure


Voulez-vous une lecture accordée au temps de ce début d'automne ? Considéré outre-Atlantique comme un classique, We Have Always Lived in the Castle, dernier roman écrit par Shirley Jackson, est un petit bijou acide et noir, qui demeure pourtant, par chez nous, obstinément méconnu du grand public – malgré les tentatives répétées, une fois tous les dix ans environ, des éditeurs français de "caser" ce texte dans des collections dévolues à différents genres : le fantastique, puis la littérature "générale", puis l'horreur (Nous avons toujours habité le château), et plus récemment, à la faveur d'une retraduction (Nous avons toujours vécu au château), le polar. Les plus cinéphiles de mes lecteurs se souviendront peut-être du nom de l'auteur comme de l'inspiratrice, par un autre texte, de The Haunting de Robert Wise. La narratrice de cet ultime opus, Mary Katherine Blackwood, dite Merricat, dix-huit ans (quoique son langage et ses manières fantasques semblent la raccrocher plus à l'enfance qu'à l'âge adulte), nous informe dès l'entame, entre autres choses, de son regret de ne pas être un loup-garou et de son amour des amanites phalloïdes : le ton est posé... Il s'avère rapidement que les Blackwood, du moins ce qu'il en reste, vivent en parias dans leur grande demeure quasi vide à l'écart du village, depuis qu'un plat de fraises saupoudré d'arsenic a emporté presque toute la famille, six ans plus tôt. Les trois seuls survivants, et donc autant de suspects, sont Merricat, qui brave une fois par semaine l'hostilité du voisinage pour faire les courses, et entoure régulièrement le terrain de protections "magiques" contre le monde extérieur ; sa grande sœur Constance, jadis jugée pour le crime puis acquittée, qui vit désormais recluse, ne supportant qu'au compte-goutte quelques visites choisies ; et l'oncle Julian, qui n'a réchappé du repas fatal qu'au prix de la perte d'une partie de ses facultés physiques et intellectuelles. Ce petit clan dysfonctionnel en diable vit une existence extrêmement ritualisée qui lui permet de trouver, à sa façon, un certain bonheur, tout en conjurant le spectre de la crise passée comme de celles qui semblent pouvoir toujours survenir. L'irruption, dans cet univers clos à l'équilibre instable, du cousin Charles, qu'on devine venu faire main basse sur les richesses de la famille, va jeter à bas le fragile édifice, au propre comme au figuré. D'autant plus étonnant et fascinant d'être suivi par les yeux un peu fous de Merricat, l'enfant sorcière, le récit de Shirley Jackson trace sa voie aux lisières des genres et des attentes, entre whodunit et onirisme, humour et suspense, conte gothique et scènes de la vie de province, poésie lyrique et portrait de famille caustique pour ne révéler qu'après le dernier tournant, dans de magnifiques dernières pages, le but de la balade... Sans vouloir trop en révéler, que l'on suive la piste du fantastique ou celle du cas clinique, on peut dire que c'est rien moins qu'à la constitution d'un tall tale, cette forme très américaine de folklore brouillant les pistes entre l'anecdote et la légende, que l'on aura assisté. Ajoutons que si la critique a pointé depuis longtemps la marque, côté amont, du Henry James de The Turn of the Screw, il me semble fort qu'on peut détecter à la lecture un air de parenté de style, côté aval, avec une Joyce Carol Oates : on fait pire lignage. Mais qu'on ne s'y trompe pas : la mélodie de ce roman reste tout à fait singulière – petite comptine hallucinée pour un piano désaccordé –, et devrait continuer à joliment vous hanter si, vous aussi, vous vous décidez à tenter une visite aux sœurs Blackwood...

vendredi 3 octobre 2014

Fort comme la mort



Mario Caiano n'est pas l'un des noms qui vient en premier à l'esprit lorsqu'on évoque le cinéma fantastique transalpin des années 50-60. Il ne fut ni Freda, ni Bava, ni même un petit maître reconnu comme Margheriti ou Mastrocinque, et resta toute sa carrière un artisan obscur s'employant dans tous les genres à la mode, du péplum au giallo au passant par le western spaghetti. Sous le pseudonyme d'Allan Grünewald, il réalisa pourtant en 1965 avec Amanti d'oltretomba tout à la fois l'un des fleurons de sa carrière et de la vague du gothique à l'italienne (il est vrai éphémère, et déjà finissante à cette date). Tourné en un mois dans le huis clos d'une villa romaine, avec un budget évidemment minimaliste et six acteurs en tout et pour tout, le film est investi de tout l'amour et la fascination pour le fantastique de son concepteur, marqué par le souvenir de sa découverte, enfant, d'Edgar Poe, lu pendant les soirs de couvre-feu imposé par les troupes d'occupation nazie à Rome (bonjour l'ambiance), ainsi que par l'influence de Mario Praz dont il fut l'un des étudiants à l'université. Caiano montre également qu'il sait bien s'entourer, assisté dans le choix du décor par Bruno Cesari (lequel officiera notamment par la suite chez Leone et Bertolucci), confiant les éclairages à Enzo Barboni – chef opérateur attitré de Corbucci à cette époque, qui offre là un noir et blanc assez somptueux aux contrastes très expressifs – et la musique à Ennio Morricone – qui s'en donne à cœur joie aux grandes orgues, mais cisèle aussi une entêtante petite ritournelle romantique au piano, par laquelle le personnage de Muriel, au début du récit, "appelle" son amant, et qui deviendra par la suite un leitmotiv hantant, littéralement, le film.


Devant la caméra, on retrouve Paul Müller en châtelain sadique et savant fou (dont le domaine d'expérimentation n'est jamais vraiment précisé, quoiqu'il lorgne abondamment vers les transfusions d'I Vampiri), et surtout l'incontournable Barbara Steele dans un des rôles à multiples facettes qu'on lui confia régulièrement dans les années qui suivirent La Maschera del demonio, la montrant toujours aussi fascinante en victime qu'en bourreau. Ici, elle est Muriel, première épouse, brune, adultère, du professeur, et Jenny, sa sœur, blonde virginale, et seconde épouse que le méchant compte bien, pour récupérer enfin la propriété des lieux, torturer psychologiquement avec autant de cruauté qu'il a torturé physiquement la première après la découverte du pot aux roses. La donne se complique lorsqu'il apparaît que le fantôme revanchard de Muriel se met, dans des moments de crise, à posséder l'esprit affaibli de sa jumelle (on pense évidemment à Vertigo). Si la grande égérie du gothique transalpin vivait comme un calvaire cet enfermement dans un même type de rôle, reine d'un genre qu'elle n'appréciait guère, et n'allait pas tarder, pour l'essentiel, à tirer sa révérence, rien n'en transparaît ici à l'écran et il est juste de dire qu'elle porte sur ses épaules une grande part de la réussite du film. Il serait abusif, en revanche, de réduire celle-ci à la performance de son actrice principale. Si ces Amanti d'oltretomba n'évitent pas quelques faiblesses et raccourcis faciles, les amateurs apprécieront l'originalité avec laquelle Caiano traite des motifs traditionnels du registre auquel il rend hommage, son talent pour les atmosphères subtilement oppressantes mais aussi les quelques échappées qu'il s'autorise (si les commentateurs évoquent souvent la violence inattendue des premières scènes, il est aussi capable d'une belle séquence onirique évoquant Cocteau et Buñuel), et quelques jolies trouvailles en matière de poésie macabre – comme cette orchidée plantée dans les cendres des amants qui se met soudain à secréter du sang...

mercredi 1 octobre 2014

Pauvert, Sade, Bourgeade et les autres


Jean-Jacques Pauvert – 1926-2014.

Sous l'appellation bientôt aussi officielle qu'elle est disgrâcieuse de "porno pour mamans", un raz-de-marée éditorial de romans Harlequin déguisés sous livrée S.M. de pacotille déferle continument depuis des mois suite au succès des médiocres Fifty Shades of Grey. Neutralisation de la transgression, qui devient objet de consommation courante s'affichant par présentoirs entiers, bien en vue désormais, au premier rang des "grandes surfaces culturelles". Réduction du fantasme à un éventail morne de choix multiples pour magazine pseudo-branché, tandis que l'époque carbure toujours autant à la moraline. Soit dit en passant, gageons que qui chercherait au milieu de ces étalages de nuances de jaune, de tons de bleu, de teintes de rouge, etc., Venezia, inédit posthume de Pierre Bourgeade que les éditions Tristram nous offrent en guise de contribution à la "rentrée littéraire", aurait probablement à aller fouiller plus loin. Il est vrai que c'est d'une autre trempe. Deux Américaines milliardaires et fétichistes, l'une infirme de naissance, l'autre octogénaire, entourées de quelques gigolos un peu minables et d'une troupe d'acteurs actionnistes, s'adonnent jusqu'à ce que mort s'en suive à leurs délires dans les chambres d'un hôtel de luxe complaisant. Entre farce grotesque et théâtre de la cruauté, le récit est servi par un style, comme toujours avec Bourgeade, économe, clair, vif, qui va à l'os. Je prendrais volontiers le pari qu'il y a plus de littérature dans ces cent pages imprimées gros que dans bien des pavés de "romance érotique" d'E.L. James, Sylvia Day et consorts ; et ce n'était pourtant pas faute pour Bourgeade de se méfier de la "littérature" !


Un autre auteur, pourtant, est pour ainsi dire plus chanceux, et a droit à une large place au soleil à côté des autres : Sade. Jadis banni des mémoires, le marquis est désormais à la mode. À la veille du bicentenaire de sa mort, il est partout (même en couverture du Point !), lui qui avait réclamé qu'on sème des glands sur sa sépulture afin que "le terrain de ladite fosse se trouvant regarni et le taillis se trouvant fourré comme il l'était auparavant, les traces de ma tombe disparaissent de dessus la surface de la terre comme je me flatte que ma mémoire disparaisse de la mémoire des hommes". Deux grandes expositions à lui consacrées s'apprêtent à ouvrir leurs portes, l'une au Musée d'Orsay à Paris codirigée par Annie Le Brun, l'autre à la Fondation Bodmer près de Genève sous l'égide de Michel Delon (la confrontation risque d'être sportive), et à défaut de taillis ce sont les publications qui fleurissent. On peut les trouver, bien en vue elles aussi, sur les présentoirs des Fnac, tenant le milieu entre les classiques au programme du bac ou des prépas, et les volumes de "mommy porn". On se demande confusément lequel est censé justifier l'autre. On n'ose se demander ce que le premier concerné lui-même en eût pensé. La disparition ce week-end de Jean-Jacques Pauvert nous rappelle, s'il en était besoin, qu'il fut sans nul doute possible l'artisan clé de ce passage de l'ombre absolue à la lumière écrasante : au sortir de la seconde guerre mondiale, à vingt ans, il publia pour la première fois au grand jour, et au prix de plusieurs années de procès, l'œuvre intégrale de Sade. 

 
Et on finirait presque par croire que Sade se venge, car ce coup d'éclat fondateur éclipse à peu près tout le reste de la carrière de Pauvert dans les notices nécrologiques médiatiques. Tout au plus certaines évoquent-elles aussi Histoire d'O de Pauline Réage (dont il mit vingt ans à écouler le tirage original). C'est oublier, entre autres choses, les derniers essais de Breton, Bataille tiré de l'anonymat et Roussel de l'oubli posthume, la première traduction française de La Désobéissance civile de Thoreau, des republications de textes de Georges Darien ou de René Crevel aussi bien que de Victor Hugo ou du Littré, et des titres comme L'Astragale d'Albertine Sarrazin, Lourdes, lentes... et le diptyque des Chasseurs d'André Hardellet, Le Bain de Diane de Pierre Klossowski... Pas si mal, pourtant ! Car si, dans un essai publié en marge du procès d'Eden Eden Eden de Guyotat (et judicieusement reproduit récemment sur le blog de Charles Tatum), "JJP" affirmait sa méfiance vis-à-vis de l'argument de la qualité littéraire quand il sert, si j'ose dire, de cache-sexe pour légitimer la censure du moment qu'on ne l'applique qu'aux autres, l'éditeur engagé pour une totale liberté d'expression ne s'en doublait pas moins d'un "lecteur amoureux" sûr de ses goûts. L'engouement actuel autour de l'excellent ami Donatien (comme dirait le duc d'Auge) le laissait, paraît-il, sceptique, se félicitant que ces textes soient maintenant disponibles mais doutant qu'ils soient  véritablement lus par les foules, ni, d'ailleurs, destinés à l'être. Il est certain que les amateurs de PDG à cravaches BCBG et de vierges secrétaires énamourées actuellement en vogue, qui chercheraient en Saint-Fond, Dolmancé, Eugénie, Justine ou Juliette des ancêtres mignardement emperruqués de leurs héros, vont au devant de sérieuses déroutes. S'il ne reste pas grand chose dans la France d'aujourd'hui du spectre de la censure institutionnelle, la question de ce qui mérite d'être lu (ou vu, ou entendu) ne s'en pose qu'avec d'autant plus d'acuité au choix de chacun. Cela fait deux choses pour lesquelles on peut remercier Jean-Jacques Pauvert de ses contributions.