Si le fétichisme consiste à susciter une jouissance nouvelle à partir d'idées, d'images, de scénarios préétablis, on rendra grâce à Julien Carbon et Laurent Courtiaud d'avoir si bien su marier le fond et la forme dans leur film qui a, de surcroît, le mérite de porter le plus beau titre de l'année écoulée, Les Nuits rouges du bourreau de jade. Visiblement passionnés tous deux de cinéphilie déviante, biberonnés au bis, à la série B, au Z et au X, au giallo comme au polar HK, ils ont en outre le bon goût d'éviter de se borner à un exercice d'hommage référencé. Car le duo agit moins en copistes des grandes œuvres du répertoire, qu'il n'utilise les genres comme matériaux à travailler pour créer un patchwork et de stimulants rapprochements. Ainsi la traversée d'une angoissante collection de mannequins de cire (ou de victimes ?...) qui n'est pas sans rappeler étrangement l'univers de Cocteau débouche-t-elle, par exemple, sur un décor d'intérieur japonais traditionnel – le tout sis à l'intérieur du même immeuble de la plus banale apparence. Jamais trépidant, jamais contemplatif, le film ne fonctionne pas suivant des alternances de rythmes, mais sur les ruptures ou enchaînements qui naissent de ces juxtapositions, de l'angoisse au trouble, de l'onirique au gore, de l'érotisme au polar, du réalisme au maniérisme... comme autant de morceaux d'une rhapsodie à travers lesquels le spectateur est conduit à l'allure à peu près immuable, lentement implacable, du rêve, ou du cauchemar.
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