lundi 26 mars 2012

Aux vents du printemps


Elle dit : car les robes débordent de vent.
La peinture sur les robes fait le tour anatomique des couleurs,
elles respirent. Que l'étoile écumante s'élance impétueuse
différant le mouvement de la grâce,
les omoplates,
et puis tout se désordonne au creux des yeux.
Alors on souffle, elle dit que l'exultation suspend
le pouvoir des larmes
et tout cela, étoffes et climat floral en un escarpement de verts et de roses.
Elle ne se gardent ni du péril, ni
de la peur, elles semblent avancer vers nous, leurs robes gonflées.
Plein vert, âme, ivresse, une brassée, ici, ah
longs printemps : éléments purs en travail dans la fable du monde.
Rose sombre battant au vent, comme battent les pales du vent
d'œil en œil, hâtives chevelures.
Elle a dit : la vue est cernée d'air, elles sont tellement rapprochées
avec l'air qui s'amoncelle entre les comètes ; et leurs robes
rafale hémisphérique entre une ligne bleue et une ligne de lumière.
Amour, si la porte s'ouvrait sur le bois et qu'entrât le léopard
entonnant le poème de la création, si la pierre d'or taillait se fendait
dans le noir. Les doigts palpent l'aura de chaque orange en son lieu
– le manteau tout entier,
jaune soudain. Appelez-moi comme on appelle la forêt près du feu.
Les voir entre elle et moi, ces robes pulmonaires
les voir
d'haleine en haleine, la voir prodigieusement
se déplacer
sous le souffle des robes. Et le rose grandissant, le vert et le pollen abrupts,
confondus lorsqu'elle tournoie dans la saison sauvage – puis, anuitée.
Une corolle haletante lui monte à la bouche car bientôt tout ne sera plus que
ténèbres et tremblement,
si par exemple cette corolle mûrit de sa main à la mienne.
On meurt à contempler la peinture, on respire
face à face, sur le seuil le léopard entonne le poème de la création.
Une bague, une flore, des gens, c'est nous, une bague, une œuvre.
Main dans la main, par là nous commençons à nous confondre
bloc de lenteur dès la racine
bloc d'or.
Amour, si la porte à la muraille d'émeraude –

Herberto Hélder, Les Sceaux (Os Selos, traduction par Magali Montagné et Max de Carvalho).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire