Si nous ne pouvons la faire pratiquer je m’arrangerai de manière que la chambre du fond sera inconnue, barricadée, impénétrable pour les étrangers. Je serai censée n'avoir que deux pièces, la troisième sera la chambre noire, la chambre mystérieuse, la cachette du revenant, la loge du monstre, la cage de l'animal savant, la niche du trésor, la caverne du vampire, que sais-je ? nous verrons. (George Sand, Correspondance, N°388, p.882.)
mercredi 4 février 2015
Petite corruption
A Most Violent Year a de faux airs de Godfather en réduction. Ceci soit dit sans que cela soit une critique négative, ni de l'un, ni de l'autre. Moins ambitieux dans sa forme, évidemment, il propose également à son personnage principal un renversement moins éclatant – moins complet, en apparence – que celui de Michael Corleone dans le film de Coppola, qui passait de l'étudiant fermement décidé à se tenir à l'écart de toute illégalité au rôle de nouveau "parrain" de sa famille mafieuse. Le parcours d'Abel Morales est plus subtil, au point qu'il a pu échapper à certains spectateurs (voire à certains critiques), et, ce qui est plus intéressant, qu'il échappe, selon toute apparence, au personnage lui-même. Sur fond de deuxième choc pétrolier, et de prémices du déchaînement du néolibéralisme, le film de J.C. Chandor n'est autre que la chronique feutrée d'une corruption, qui voit un tenant exemplaire de toutes les valeurs et les vertus de l'American Way of Life en venir à se renier totalement – à accepter sans plus ciller le recours à la violence comme à la magouille, qu'elle soit financière ou politique, ou le sacrifice d'un employé encombrant – tout en restant persuadé d'arpenter "the path that is most right", le chemin "le plus droit possible" vers le succès. Et en continuant, également, à délivrer des leçons de morale à ce propos, et à se donner en modèle. Est-il besoin de préciser qu'on n'est toujours pas sorti de ce monde-là ?
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