lundi 5 mai 2014

Promenons-nous dans les bois


Plan récurrent, chez Fisher, qui voit un personnage émerger progressivement au milieu des branchages d'un taillis, prélude à une inquiétante rencontre. Ainsi de la créature de Frankenstein croisant la route de l'aveugle, comme de la jeune Tania répondant à l'appel de Lucy transformée en vampire ; que ce soit la future victime qui s'avance ou qu'elle se trouve sur le chemin de l'autre : deux facettes d'une seule pièce. Ainsi même du docteur Watson sur la lande désolée, peu fertile, pourtant, en bosquets, comme nous en assurent les plans plus larges. Forêt de peinture romantique allemande là encore le souvenir de Friedrich. Forêt de roman gothique anglais, territoire arpenté de Radcliffe et de Lewis. Forêt toujours des premiers temps du monde, souvenir immémorial de l'en-dehors des cités et de toute civilisation, le chaos où rôdent monstres et dieux : "Transylvania, land of dark forests, dread mountains and black unfathomable lakes. Still the home of magic and devilry as the nineteenth century draws to its close..." Mais forêt qui continue de faire résonner son appel impérieux sur chacun, malgré le danger ; ou peut-être, faut-il croire, à cause de lui ? Dans le cinéma de Fisher, on ne se promène guère dans les bois que lorsque le prédateur y est.