vendredi 26 août 2011

Victoire de Félicité

L'esprit vagabonde où il veut et, je ne sais pourquoi, il a choisi pendant ces quelques jours de vacances de me rappeler les Trois Contes de Flaubert (pourtant plus ouverts depuis des années), ou plus précisément cette scène d'Un cœur simple dans laquelle la bonne normande se rend chez le pharmacien Bourais dans l'espoir d'obtenir de lui des informations sur Cuba pour lequel s'est embarqué son neveu Victor. "À cause des cigares, elle imaginait la Havane un pays où l'on ne fait pas autre chose que de fumer, et Victor circulait parmi les nègres dans un grand nuage de tabac." Bourais exhibe son atlas avec "un beau sourire de cuistre devant l'ahurissement de Félicité", la fait se pencher sur "un réseau de lignes colorées" qui "fatigu[e] sa vue, sans rien lui apprendre". Ah ! le rire énorme du grimaud lorsque Félicité lui demande de lui montrer la maison où demeure son neveu : "une candeur pareille excitait sa joie" joie cruelle. Ambiguïté de Flaubert lui-même qui s'il condamne le cuistre, témoigne tout de même lui aussi d'une commisération amusée à l'égard de son personnage, qui "s'attendait peut-être à voir jusqu'au portrait de son neveu, tant son intelligence était bornée !" Quant à la position du lecteur, elle oscillera également, selon son humeur, entre la pitié et l'égaiement. Erreur générale. Ils sont nous sommes tous dedans. C'est Félicité qui a raison. Bornée, la servante de Mme Aubin ? Elle est en avance sur tout le monde. Moins de deux siècles à attendre, et voici l'heure de Google Earth.

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